mercredi 28 janvier 2015

La fourmi et la cigale


 Une fourmi fait l’ascension
d’une herbe flexible
elle ne se rend pas compte
de la difficulté de son entreprise

elle s’obstine la pauvrette
dans son destin délirant
pour elle c’est un Everest
pour elle c’est un Mont Blanc

ce qui devait arriver arrive
elle choit patatratement
une cigale la reçoit
dans ses bras bien gentiment

Eh dit-elle point n’est la saison
des sports alpinistes !
(vous ne vous êtes pas fait mal j’espère ?)
et maintenant dansons dansons
une bourrée ou la matchiche.



Raymond Queneau

Le BOURDON


Contrebasse
Grosse caisse
Ou bombardon
Quel zinzin
Quel zonzon
Dans le vase du liseron ?
Qui ose
Qui se pose
Quel est ce jazz sur mon gazon ?



Qui zigue
Qui zague
Qui zigue et zague
Dans ma cuisine ?
Quel zazou
Quel zouzou
Dans mes oreilles
Qui ose
Qui se pose
Sur les groseilles
De Zoé
De Zazie
Et du sosie
De Mireille?
Qui bise?
Qui drise?
Qui jazz?
Quelle zizanie
Dans mes oreilles!

Jean-Hugues Malineau

vendredi 16 janvier 2015

La toute petite petite bonne femme



C’est une fois, une toute petite, petite, bonne femme qui a une toute petite, petite poule. Et voilà  qu’aujourd’hui la toute petite, petite bonne femme dit à sa toute petite, petite poule :
« Ah ! ma cocotte, si tu me ponds un tout petit, petit oeuf, eh bien moi, je me ferai une toute petite, petite omelette ».
La toute petite, petite bonne femme va dans le poulailler, et là, dans le nid, elle trouve un tout petit, petit oeuf. Alors, avec ce tout petit, petit oeuf, la toute petite, petite bonne femme se fait une toute petite, petite omelette. Et quand la toute petite, petite omelette est cuite, elle la pose sur le bord de sa toute petite, petite fenêtre pour la faire refroidir.
Mais voilà qu’une mouche, tzzz !...vient se poser sur le bord de la toute petite, petite fenêtre, mange la toute
petite, petite omelette, et puis s’envole.


Alors là, la toute petite, petite bonne femme, très, très en colère va trouver le chef de la police et elle lui
dit comme ça :
« Monsieur le commissaire, voilà ce qui se passe : avec le tout petit, petit oeuf, de ma toute petite, petite
poule, je me fais une toute petite, petite omelette et quand ma toute petite, petite omelette est cuite, je la
pose sur le bord de ma toute petite, petite fenêtre pour la faire refroidir. Mais voilà qu’une mouche,
tzzz !...vient se poser sur le bord de ma toute petite, petite fenêtre, et mange ma toute petite, petite omelette.
Cette mouche est une voleuse, Monsieur le commissaire, vous devez l’arrêter pour la mettre en prison. »

Monsieur le commissaire de police donne un gros, gros bâton à la toute petite, petite bonne femme et il
dit : « Écoutez madame, cette mouche, moi, je ne veux pas l’arrêter, je ne veux pas la mettre en prison, mais
quand vous la verrez, vous lui donnerez de ma part un bon coup de bâton. »

Justement, une mouche, tzzz !...vient de se poser sur le nez de monsieur le commissaire. Alors la toute
petite, petite bonne femme lève son bâton et pan ! elle donne un grand coup sur la mouche. 

« Tiens, voleuse ! ça t’apprendra à manger ma toute petite, petite omelette ! »
Et la toute petite, petite bonne femme s’en va.

Monsieur le commissaire de police n’a rien à dire ; mais il doit mettre un gros, gros pansement sur
son nez, pour cacher la grosse, grosse marque rouge laissée par le gros, gros bâton de la toute petite, petite bonne femme.

Le conte de la mouche tuée sur le nez du commissaire est largement répandu autour du bassin de la Méditerranée.
La présente adaptation s’appuie sur une version de la République de San Marin publiée par Paul Delarue

La lutte de l'éléphant et de la tortue

Autrefois, à une époque où il y avait tout le temps du jour et jamais de nuit, l'éléphant et la tortue se disputèrent.
" Je vais te tuer ", dit l'éléphant.
La tortue, effrayée, s'enfuit se cacher dans les rochers et l'éléphant réunit toutes les bêtes de la brousse pour la chercher.

Cependant la tortue, qui connaissait un bon remède, quand elle vit qu'elle allait être prise, saisit de la poussière et la jeta au vent et aussitôt la nuit, inconnue jusque-là, tomba sur le monde.

Les animaux, ne voyant plus le soleil, eurent peur, y compris l'éléphant et celui-ci envoya le coq pour demander pardon à la tortue et obtenir d'elle qu'elle voulut bien ramener le jour.
Le coq demanda pardon et la tortue rétablit la lumière. Mais, depuis ce temps-là, il ne fait plus clair tout le temps, et le jour et la nuit se succèdent régulièrement l'un après l'autre.


Conte burkinabé

Le lion et le vieux lièvre

Il était une fois  un lion tyrannique qui vivait dans la brousse.

Il terrorisait tous les animaux, car il les dévorait, les uns après les autres. Jusqu’au jour où ceux qui restaient lui proposèrent un pacte : le lion toujours affamé se contenterait d’un seul animal par jour. En retour, la victime se présenterait à lui tous les matins pour lui éviter d’aller à la chasse. Le lion accepta très volontiers ce marché.

Il en fut ainsi un certain temps. Puis, un jour, ce fut le tour d’un vieux lièvre rusé. Comme le voulait la coutume, il alla voir le lion de bon matin. Il arriva essoufflé, l’air fatigué, épuisé.

- Hou ! Qu’est-ce que j’ai couru ! Je viens d’être poursuivi par un lion. Heureusement que j’ai de longues pattes, car autrement, c’en était fait de moi !
- Quoi ? Un autre lion, rugit le féroce animal, très en colère : ce n’est pas possible. Ainsi, j’aurais un rival, un rival qui chasserait sur mon propre territoire ? Ah ! Cela ne va pas se passer comme ça... Où est-il ? Où est-il ?
- Près de l’étang, répondit le lièvre. Il est très grand, très fort, plus jeune et plus courageux que toi. Méfie-toi.
- Je n’ai peur de rien ni de personne. Plus fort que moi ? C’est ce qu’on va voir. Mène-moi jusqu’à lui.
Le roi des animaux à la crinière majestueuse suivit le lièvre jusqu’à l’étang. En se penchant au-dessus de l’eau, le lion vit un autre lion. Fort courroucé, il lui sauta dessus. Ne sachant pas nager, il se noya.

Et c’est ainsi qu’un lièvre malin débarrassa le pays d’un terrible tyran.

Origine : Conte traditionnel africain.

La cigale et la fourmi



La cigale, ayant chanté
Tout l’été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue :
Pas un petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la fourmi sa voisine,
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu’à la saison nouvelle.
"Je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l’oût, foi d’animal ;
Intérêt et principal."

La fourmi veut pas donner son miam miam
la fourmi veut pas donner son miam miam
la fourmi n'est pas prêteuse
c'est une vieille embêteuse
et plutot crever que donner un gramme
gramme gramme gramme gramme

La fourmi n’est pas prêteuse :
C’est là son moindre défaut.
"Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
 - Nuit et jour, à tout venant
Je chantais, ne vous déplaise.
 - Vous chantiez ? J’en suis fort aise :
Eh bien ! Dansez maintenant."

La fourmi veut pas donner son miam miam
la fourmi veut pas donner son miam miam
la fourmi n'est pas prêteuse
c'est une vieille embêteuse
et plutot crever que donner un gramme
gramme gramme gramme gramme


Fables : Jean de la Fontaine. 1695
Refrain : Pit et RiK 1981

#JeSuisCharlie


7 Janvier 2015, j'ai pas envie d'aller au lit
Je préfère prendre un stylo car, ce soir, je suis Charlie
Les artisans de la liberté ont rencontré leur destinée
Ce soir, j'écris pour eux parce que je sais pas dessiner

Soyons soixante-six millions à avoir la même idée
Pour que leurs cartouches d'encre à eux ne soient plus jamais vidées
Laissons des traces indélébiles pour que l'avenir puisse savoir
Que leur talent et leur courage ne vivent pas que dans nos mémoires

Écrivains, paroliers, dessinateurs, graffeurs
Musiciens, poètes, peintres et sculpteurs
Célébrités, anonymes, professionnels et amateurs
Faisons en sorte que cet élan s'affiche plus loin que sur Twitter

Des hommes sont morts pour défendre la liberté d'expression
Mais leurs idées doivent rayonner, ne subir aucune pression
Contre l'obscurantisme, avec honneur et insolence
À nous de prendre les crayons pour que leur combat ait un sens

J'ai mal à l'être humain, comment en est-on arrivé là?
Perdu dans ce vacarme, la fraternité chante a cappella
La barbarie grandit sans aucune trace de dignité
En 2015, le monde a perdu toute humanité

Je suis Charlie
Je suis Charlie
Je suis Charlie

Si seulement les mois qui viennent pouvaient me faire mentir
Si seulement ce drame abject pouvait nous faire grandir
Puissions-nous nous réunir pour croire ensemble à l'embellie
Quoi qu'il advienne, j'ai un stylo car, ce soir, je suis Charlie



Grand corps malade